2 janvier 2011

Accueil de l'écrivain, poète et universitaire: Tahar BEKRI


Le jeudi 16 décembre 2010, Tahar BEKRI, poète, écrivain et universitaire, invité par la Bibliothèque municipale du Breuil (France) et trois autres Associations dont le Centre Francophonie de Bourgogne, est venu présenter son dernier livre "Salam Gaza", Editions Elyzad, Tunis. (Diffusion en France : Pollen)
Devant un public intéressé mais restreint à cause de la tempête de neige, ce soir-là, l’auteur a parlé de son récent voyage en Palestine, de ses rencontres avec des Palestiniens des Territoires occupés et de son émotion devant la tombe, à Ramallah, du grand poète palestinien, Mahmoud Darwich.
A travers cet ouvrage, le poète a voulu témoigner des souffrances, des privations et de l’étouffement du peuple palestinien.
Le livre est construit en deux parties. La 1ère relate la guerre (fin 2008) contre Gaza, où il n’a pu se rendre, la 2ème aborde son bref séjour dans les Territoires occupés, notamment à Ramallah, Naplouse, Jérusalem –Est et Bir Zeit où il était invité pour des lectures par le Consulat Général de France.
Ce qui a frappé l’écrivain, c’est la réalité de l’occupation avec l’emploi de la monnaie israélienne à l’intérieur des Territoires, les nombreuses constructions de colonies sur les collines, l’utilisation des panneaux de signalisation à des fins de propagande, les interminables check-points, les conditions dans les camps de réfugiés, comme celui de Balata, aux environs de Naplouse.
Mais l’humaniste qu’est l’écrivain a surtout voulu souligner l’injustice énorme qui frappe les Palestiniens. Rappeler les restrictions des libertés, les confiscations régulières de terre, les expulsions, les destructions de maisons, les arrestations et emprisonnements arbitraires (plus de 11000 Palestiniens croupissent dans les geôles israéliennes), les assassinats ciblés, les bombardements intolérables d’écoles ou d’hôpitaux, contraires à toutes les lois internationales et en toute impunité, sans que le concert des nations s’en émeuve. Dénoncer dans cette région du monde une injustice historique que toute conscience humaine ne peut occulter. L’auteur ne partage pas la vision du Hamas qui envoie des roquettes sur Israël, mais cela ne saurait justifier le déluge de feu et de bombes, ces actes de barbarie et crimes de guerre. Le silence des médias occidentaux ou leur parti pris ne peut nous satisfaire ni cacher la tragédie palestinienne car cela constitue les sources d’une menace permanente sur la paix mondiale. Condamner les projets et agissements colonialistes d’Israël dans les Territoires occupés depuis 1967 ne peut être assimilé à de l’antisémitisme, tout aussi méprisable comme tout racisme.
Comme l’a fait remarquer une auditrice dans le public, il y a quelque chose de paradoxal, voire de psychanalytique, dans la politique anti-palestinienne d’Israël. Comment un peuple qui a tant subi : l’anathème, les rejets, les pogroms, la shoah, les camps de concentration, peut-il traiter un autre peuple avec une telle violence ? Les violences sèment la haine, le désespoir, découragent les meilleures volontés.
« Salam Gaza » est un livre profondément humain où se reflète le désir de paix. Il revendique le respect des Droits fondamentaux pour tout individu, où qu’il soit, quelles que soient son origine, sa religion, sa culture, sa langue. Il ne demande ni plus ni moins pour les Palestiniens.
Quoique écrit en prose, « Salam Gaza » est un livre de carnets empreints de poésie. Outre les poèmes de Tahar Bekri, on y trouve de beaux textes de Mahmoud Darwich, Marilyn Hacker, Ghassan Zaqtan, Tristan Cabral…
Un livre qui se veut fraternel et généreux.

Citations extraites de l’ouvrage :
Je n’ai que ma plume pour condamner la haine, dénoncer l’injustice, déjouer le mensonge.
Je n’ai que ma plume pour désavouer l’arrogance des armes, l’ivresse des puissants, la violence des conquêtes.
Le monde ne peut laisser le sang des innocents couler sur les pierres de prière, le monde ne peut se cacher la face au nom de la culpabilité.
------------------------------------------Le Breuil
Avant le débat, Tahar Bekri a rencontré la journaliste du journal de Saône et Loire, voici un extrait de l'article:

"Cet ouvrage est un journal personnel plein de poésie et d'émotions dans lequel s'esquisse une interpellation morale de l'histoire". Pour Tahar, ces quelques jours passés là-bas, lui ont fait découvrir une réalité plus tragique, plus douloureuse, plus violente que ce qui est rapporté et montré dans le monde. « L'opinion mondiale n'est pas assez informée sur la situation des Palestiniens et ce livre était nécessaire pour mieux comprendre. On ne peut pas occulter ce drame qui se déroule depuis longtemps. " (M.C. Cannard)


Avant sa venue, nous avions posé trois questions au poète, nous en publions les réponses

Le Centre Francophonie: 1) Invité par le Consulat Général de France à Jérusalem-Est pour une série de lectures, vous êtes allé dans les Territoires Palestiniens occupés, pourquoi avoir écrit le livre « Salam Gaza » ?

Tahar Bekri: En effet, je suis allé en Cisjordanie en mars 2009 où j’ai fait des lectures et des rencontres à Ramallah, Naplouse, Jérusalem-Est et Bir Zeit. Ce voyage est arrivé après la guerre contre Gaza en décembre-janvier 2008. Ces deux événements constituent la base de mon livre, devenu comme une nécessité qui s’est imposée à moi pour témoigner de la souffrance et de la tragédie palestinienne et interpeller l’Histoire et la conscience universelle. Le poète doit défendre la beauté d’un monde juste et fraternel, ne pas être complice de l’oppression, de la colonisation des terres et la confiscation du droit, l’humiliation des peuples.

Le CFB 2) On connaît votre inlassable souci de justice et de liberté. Est-ce parce que vous avez connu les prisons de Bourguiba et l’exil ?

T.B: Je vis en France depuis 1976 et reviens en Tunisie depuis 1989. L’éthique dans l’écriture me dicte cette conviction forte que sans le respect des valeurs fondamentales, l’humain manquerait de dignité. Qu’est ce que la poésie si elle n’est pas chant de liberté, beauté lumineuse, parole généreuse, quête des vérités profondes, amour de la vie humaine ?

Le CFB 3) Vous êtes connu comme un poète francophone mais vous enseignez aussi la langue arabe à l’Université de Nanterre, vous écrivez également en arabe. Selon vous que peut apporter à l’humanité cette diversité des langues ?

T. B: J’ai eu la chance en Tunisie de suivre un enseignement bilingue que je considère comme une richesse. Cela m’a ouvert deux fenêtres sur deux cultures parmi les plus vivantes. La pluralité et la diversité des langues est comme une mosaïque qui embellit le paysage humain. Ce qui est monochrome est monotone. L’humanité ne s’est pas faite grâce à une seule civilisation ou une seule langue. La diversité linguistique apporte beaucoup à la tolérance culturelle, réduit l’hégémonie, érige le droit des peuples à choisir leur identité.

Aucun commentaire:

Les visiteurs du blog

Publication C.F.B

Publication C.F.B
Pour en savoir plus: "classement thématique" du site