5 juin 2012

Un barrage de sucre

            Titre: Un barrage de sucre
           Auteur: Moha Souag 
           Editeur: Marsam (Maroc)
Le roman de l’écrivain marocain, Moha Souag, par ailleurs excellent nouvelliste, nous transporte sur le fleuve Ziz, dans la région de Tafilalet, dans l’Est marocain.
          La construction du barrage s’avère être une idée judicieuse  pour nous introduire de l’intérieur, dans la société marocaine.
          L’auteur est impitoyable et sans concession. Les puissants (gouverneur, caïds, responsables d’administrations  et à tous les échelons) sont montrés dans toute leur cupidité, leur arrogance surtout vis-à-vis du plus petit et leur autoritarisme, souvent pour cacher leurs méfaits. La corruption s’étale à tous les niveaux. Elle broie les hommes et leur conscience.
         Un caïd intègre, se verra accusé de fautes imaginaires. Karim Bella, un jeune ingénieur, en fait, le fil conducteur du roman, frais émoulu de l’Ecole d’ingénieurs, de bonnes résolutions plein la tête, découvrira, ébahi, l’ampleur de ce cancer social, la corruption organisée. Il ratera aussi, hélas,  sa vie sentimentale (sa fiancée, ambitieuse, refusera ces contrées désertiques) et sombrera dans l’alcoolisme et le désespoir. Un fiasco pour un pays qui a pourtant intérêt à utiliser toutes les compétences de ses forces vives.
          Il se dégage de ce roman un évident pessimisme. Quel destin pour une société, un pays, quand l’individualisme, l’absence de scrupules, la perte du sens commun et la main mise des clans sont des pratiques à grande échelle ?
 Le Maroc a bien de soucis à se faire si de tels comportements, si peu démocratiques, ne sont pas enrayés rapidement.
         Style limpide, construction linéaire, roman agréable à lire.
         Le titre peut se lire comme un jeu de mots : un barrage où tout le monde « se sucre ».
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                    Présenter Moha Souag, écrivain marocain d’expression française, est à la fois simple et compliqué. De culture amazighe, né à Taos (Boudnib), en 1949, romancier, poète et nouvelliste, cet  ancien professeur de français, a cessé d’enseigner pour se consacrer à l’écriture.
                  Peu connu sur la scène internationale francophone, (l’auteur modeste n’accourt pas, comme certains, dès qu’un projecteur s’annonce), il n’en demeure pas moins que son œuvre en fait un    auteur majeur de la littérature contemporaine marocaine et un auteur de grand talent au sein de la littérature francophone.
                  Tout au long de ses textes, Moha Souag refonde le monde, invente des situations aussi familières qu’étranges. La vie s’y écoule comme elle se présente, avec ses échecs et ses succès (peu nombreux, il est vrai !), avec ses drames et ses réussites, avec ses injustices criantes et honteuses et ses petits bonheurs vrais.
                   Ce qui frappe, et c’est en cela qu’on reconnaît un grand écrivain, Moha Souag connaît les milieux qu’il décrit. Il sait, avec justesse, montrer les contraintes et peurs (administratives et/ou religieuses) des petites gens, le lent éveil des mentalités, ne se prive pas de dénoncer l’outrance et l’arrogance des puissants. Il est bien conscient de la contradictoire situation de la femme marocaine. Mais au-delà de cet univers sombre, l’auteur marocain laisse deviner que derrière le laid et « le moche » se cache le beau, derrière la contrainte ou les chaines de l’esprit se dessine la liberté libératrice.
                     Voici un grand écrivain  marocain d’expression française que le Centre Francophonie de Bourgogne se devait de faire connaître sur son blog.
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