18 juin 2016

Accueil de Ying CHEN, auteure sino-canadienne.

   
       Accueil de Ying CHEN, romancière sino-canadienne
  
Ying CHEN
Le Centre Francophonie de Bourgogne a accueilli, en Bourgogne, du mardi 29 mars au vendredi 1er avril 2016, madame Ying CHEN, auteure francophone d’origine chinoise.
L’auteure a rencontré une classe de 4ème du collège la Croix Menée(Le Creusot), 3 classes au lycée Léon Blum (Le Creusot), une terminales et des classes professionnelles « coiffure et esthétique ».
Plusieurs rencontres-débat ont eu lieu : Espace Paul Bert  à Auxerre (Yonne) en partenariat avec la Maison de la Francophonie d’Auxerre, à la BM de Dracy Le Fort (71) et à celle de Saint Léger sur Dheune (71) et enfin à la Maison des familles de Torcy (71) qui s’est achevé par un repas partagé avec les lecteurs.
 La romancière  a aussi pu découvrir la région et en particulier la ville de Beaune (21)
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En débat au CDI du lycée Léon Blum(Le Creusot)










4 lectrices lisent des extraits des oeuvres de Ying (Maison des Familles de Torcy)















Ying CHEN est née à Shanghaï (Chine) et à 27 ans, elle s’expatrie au Québec, après un bref séjour à Paris. Elle vit actuellement à Vancouver (Canada).
Titulaire d’un master en littérature française, parlant plusieurs langues, elle choisit le français comme langue d’écriture. Son roman   « L’ingratitude » la fait connaître : Prix Québec-Paris (1995), Prix des Libraires. D’autres œuvres suivront : « Mémoire de l’eau », « Lettres chinoises », toutes marquées par l’empreinte de son pays d’origine. Exilée volontaire, elle est confrontée à la double culture, aux questions sur l’immigration, aux regards et jugements des autres.
 Un autre cycle suivra « Espèces », «  Le mangeur », « La rive est loin », un enfant à ma porte », ….au champ plus restreint sur le couple et plus sartrien aussi.
 Mais son dernier ouvrage « La lenteur des montagnes », très riche, plus personnel ; en fait, une lettre de réflexions adressée à son fils, reprend à bras le corps le thème de l’exil, de l’identité, des racines qu’on pourrait résumer par « Qui sommes-nous ?
Ying CHEN est une femme accueillante et réservée, à l’écoute, une mère vigilante. Soucieuse de l’avenir, lucide face aux réalités de l’exil, en constant questionnement sur la diversité, c’est une écriture « migrante » de référence.
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Voici pour se familiariser avec l’univers littéraire de Ying CHEN, quelques citations significatives et une interview réalisée par Creusot-infos, avant sa venue.
 L’ingratitude (Edition Léméac)
         «  On appartient toujours à quelque chose. On est des animaux sociaux » (p. 134)
 La mémoire de l’eau (Edition Léméac)
        « Grand’mère ne croyait pas à l’autre vie. Elle jugeait pourtant triste de ne pas pouvoir croire à un au-delà » (p.96)
Lettres chinoises (Edition Léméac)
         « En quittant une ville où on a vécu quelque chose, on sent une partie de sa vie se perdre… Le vide en soi devient sans borne » (p.59)
         «  Le monde, le pays, le peuple, ce sont des choses trop grandes pour nous qui ne comprenons même pas bien notre propre destin » (p.96)        
 Espèces (Edition du Seuil)
        «  Les gens se croient durables et veulent exercer un contrôle sur tout. Ils n’ont tué leur dieu que pour le remplacer par eux » (p. 85)
        « L’humanité devient mon obsession, mon culte, l’objet de ma contemplation, le noyau de ma spiritualité » (p. 172)
 Le Mangeur (Edition du Seuil)
         « Une naissance est une perte, une perte un commencement, la fin est le retour, le retour n’est jamais un rendez vous, c’est ainsi que je vois tout ce qui est, tout ce que je vis » (p. 114)
          «  Ne plus vivre, c’est comme ne plus mourir » (p.122)
Le champ dans la mer (Edition du Seuil)
                 « Tout équilibre est provisoire et toute paix, conditionnelle » (p.81)
                 «  Mon patrimoine : la mémoire du passé, l’enfance » (p. 107)
Quatre mille marches (Edition du Seuil)
                « Chaque langue est une patrie » (p. 20)
                « Le sol et les langues sont comme des amants possessifs » (p. 32)
                « Il s’agit de savoir se confondre dans le tout pour cultiver le soi, et ensuite plonger dans le soi pour comprendre le tout » (p. 42)
                « La littérature que j’aime est une forme d’interrogation, une quête de ce qui est haut, large, intérieur » (p. 73)
 La lenteur des montagnes (Edition Boréal)
           « J’adore écrire des lettres qui permettent la spontanéité et l’intimité, sous une apparence informelle » (p. 27)
            « En fin de compte nous n’appartenons à rien d’autre qu’à nos propres rêves » (p. 41)
            « Etre autre est une expérience douloureuse pour un immigrant » (p. 44)
            « La migration et l’écriture sont pour moi une seule et même expérience » (p. 54)
              « La langue française est aussi un espace intérieur. Elle devient l’air qu’il respire, la source à laquelle il boit, l’habit qu’il porte, la maison qu’il habite. Cette langue n’est pas un but ni un moyen ni une solution, elle est la vie même » (p.88)
             « Nous sommes poussière mais aussi étoiles » (p.109)
             « Je veux te rappeler que vivre, n’est pas synonyme de faire, que tout n’est pas quantitatif, que vivre c’est d’abord être » (p.118)
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BOURGOGNE : Ying CHEN invitée du Centre Francophonie de Bourgogne
Le Mercredi 30 mars 2016 @ 01:15:02


Quatre questions à Ying CHEN, invitée du Centre Francophonie de Bourgogne
Bonjour madame Chen,
1)    Creusot infos : Vous êtes née à Shanghai, y avez fait vos études et à 27 ans, vous avez désiré vous expatrier en France, puis au Québec. Pourquoi ?

Ying Chen : Plus précisément j'ai démissionné de mon travail comme traductrice à   27 ans, parce qu'à l'époque, je m'ennuyais à mon poste. Les choses ne bougeaient pas aussi vite qu'aujourd'hui. Les jeunes de ma génération étaient très mécontents de notre situation d'alors et nourrissaient des illusions sur une vie meilleure ailleurs, sur un système meilleur, sur des valeurs supérieures, sur le succès de l'Occident, etc. Nous avons voulu voir d'autres mondes.
Je suis d'abord allée à Montréal, simplement parce que l'un des amis a pu aider pour la paperasse. Sachez qu'à l'époque, passer n'importe quelle frontière avec un passeport chinois exige de la haute prouesse.
Je ne suis venue en France que pour les visites et les activités littéraires, quelques années après.
2)    Creusot infos : Vous vivez à Vancouver, une ville cosmopolite, en  Colombie Britannique. Vous écrivez en Français, or, la Province où est implantée Vancouver parle anglais et il existe une forte présence asiatique. N’est-ce pas compliqué pour vos enfants ?

YC : Très, très compliqué, pour mes enfants et aussi pour moi-même. D'abord, notre famille a emménagé à Vancouver, parce que mon mari a été mis au chômage par l'université McGill où il a travaillé 5 ans (le système est très cruel et hypocrite, auquel nous n'avions pas du tout l'habitude), il est donc allé enseigner en Californie. J'ai choisi de rester avec les enfants à Vancouver en attendant qu'il obtienne sa permanence. Mais mon mari a été  atteint d'un cancer peu de temps après.
Vancouver était donc pour moi plutôt un endroit provisoire. Mais on finit par y rester pendant de longues années. Cette ville est cosmopolite seulement en apparence. Il y a, dans la population «locale », un très fort désir de la voir beaucoup moins colorée, beaucoup plus homogène. Il est, et il a toujours été, un endroit politiquement inconfortable pour les asiatiques, surtout les chinois. Malgré les belles images et la propagande d'un Canada ouvert et tolérant, cela se voit très fortement dans les écoles secondaires. Tout cela, pour dire que je ne me sens pas « implantée », malgré  tous mes efforts de créer des attaches : linguistiquement (je lis la littérature anglaise) et autres.
Finalement, je tends à croire que nous n'avons pas toujours besoin d'une patrie. Je l'ai longtemps rêvée pour moi et surtout pour mes enfants. Mais maintenant, nous irons là où les enfants trouveront leur place.
 
3)    Creusot infos : Vous avez vécu l’exil, certes volontaire. Cependant, pouvez-vous nous décrire rapidement les difficultés de toutes sortes que peuvent vivre les exilés dans un pays étranger ? Situation actuelle de nombreux exilés en Europe fuyant la guerre et la violence.
YC : J'ai partiellement répondu à cette question. Les exilés, quel que soit le motif du départ, doivent bien faire face à l'environnement de leur point d'arrivée. Je ne suis pas en position de clamer, vis-à-vis de la société d'accueil, plus de générosité, plus d'ouverture, plus de compréhension, plus de solidarité, plus de justice. Je pourrais seulement constater que, depuis le tout début de l'histoire humaine, l'homme a toujours voyagé et déménagé. L'exile fait partie du destin humain. Cela est une loi naturelle, que personne ne peut changer, même pas Hitler, qu'aucun pouvoir ne peut déjouer, même pas avec « head tax ». Ce que je pourrais aussi faire est de conseiller aux exilés de bien étudier la situation géo politique avant de partir, afin de ne pas tomber dans un endroit où l'hostilité est historiquement forte envers son ethnie ou envers son pays d'origine. 
4)    Creusot infos : Vous parlez six langues. Toutes les langues ont leur importance. Toutefois quel rôle peut jouer la francophonie entre les peuples ?
J'ai eu la chance d'avoir appris le français. Je suis contente de pouvoir lire les très grandes œuvres littéraires françaises dans leur version originale. Pour mes enfants qui parlent aussi cette langue, c'est un élargissement de l'horizon. Puis, écrire dans cette langue est une riche expérience. Je ne me sens pas en position de plaider pour  la cause de la francophonie, mais je puis dire qu'elle fait partie de ma vie, et que j'en fais partie aussi, un peu, j'espère. Je m'y sens, pour une fois, « implantée », pour emprunter votre mot.
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